Directive IED : la réglementation sur les émissions au service des élevages industriels
Comment la directive IED évince la durabilité et la compassion
Télécharger La directive IED au service de l’élevage industriel
Ceux qui en attendent des progrès pour l’environnement risquent fort de s’agiter pour rien. Il est en effet assez surprenant d’observer à quel point une ‘usine à gaz’ comme cette directive échoue à préserver l’environnement (l’échec concerne la part agricole ; les autres industries ont progressé). Les régions d’Europe qui concentrent les élevages industriels en savent quelque chose. En effet, l’objectif premier de la directive est d’autoriser les installations de production de masse d’animaux. Voici comment elle réussit à détourner les objectifs environnementaux affichés :
- Les questions de bien-être animal sont hors sujet ; les pires méthodes intensives peuvent être classées ‘Meilleures Techniques Disponibles’ au titre de la protection de l’environnement.
- La limitation des émissions autorisables est calculée par animal (respectivement par place d’animal) mais ne prend jamais en compte la somme des animaux dans la ferme ou dans le territoire; donc rien ne s’oppose à la concentration des productions de masse.
- Il n’y a pas la moindre réflexion sur ce que serait un système alimentaire sain et durable.
La révision de cette directive, qui est en train d’aboutir (fin 2023), n’y change rien sur le fond. Le débat s’est focalisé sur l’intégration ou non des bovins dans le périmètre de la directive. Leur impact sur l’environnement le justifierait, évidemment. La Commission voit la solution sous forme d’additifs alimentaires. Qui a intérêt à développer ce marché ? L’industrie de l’alimentation animale, évidemment. Alors que le plus efficace, et de loin, pour l’environnement serait de réduire les cheptels, mais en veillant à ce que l’argent de la PAC et du consommateur arrive dans les fermes au lieu d’être aspiré par les industries et le commerce de l’amont et de l’aval.
Un (très faible) espoir est cependant permis : la Commission définira les règles opérationnelles à respecter. Il se pourrait que quelques aspects de bien-être animal (et donc de changement de système) y trouvent leur entrée… d’autant plus que toute la réglementation de protection des animaux de ferme est en révision. L’EFSA a produit des recommandations scientifiques qui imposent des changements mais se heurtent déjà à des oppositions. La Commission promet la concertation avec toutes les parties prenantes. Il y a lieu de craindre que les mêmes rapports de force créeront les mêmes effets : les puissantes filières de l’élevage industriel ne seront pas contrariées par des obligations environnementales au-delà de ce qui est contraignant par ailleurs, tant pour l’eau que pour l’air.